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  • Romain Gauthier

Prise de position sur le PL12934 et la M 2748

Dernière mise à jour : 9 juil. 2021

PL 12934 modifiant la loi générale sur les zones de développement (LGZD) (L 1 35) (Etendons la « paix des braves » au PAV)

M 2748 pour étendre la paix du logement à l'ensemble du territoire genevois (Proposition du Grand Conseil demandant au département la mise au point d'un avant-projet, conformément à l'art. 15A, al. 5 LaLAT)

* * *

Préambule


Le RPSL remercie la commission du logement pour l’opportunité lui étant faite d’exprimer son point de vue à propos du PL 12934 et de la M 2748.


Le RPSL considère que le projet de loi discuté aujourd’hui ainsi que la motion y étant adjointe visent à abroger le statut spécial dont jouit le PAV dans la LGZD. Au regard de l’ampleur du périmètre du PAV et de l’ambition du projet PAV, le RPSL considère que l’exceptionnalité statutaire dont jouit actuellement le périmètre, laquelle lui est conféré par l’Art. 4A, al. 4, let. B LGZD et par l’Art. 4B LGZD, est un élément cadre de la politique publique cantonale en matière de logement et d’aménagement du territoire.


Si, comme le préconisent le PL 12934 et la M 2748, le principe des trois tiers (art. 4 A, al. 1 LGZD) était appliqué aux parcelles du PAV situées en ZD et dont la propriété est publique, il en découlerait une diminution du nombre de logements LUP. En effet comme son nom l’indique, le principe des trois tiers prévoit un tiers de logements LUP en ZD (art. 4A, al. 1


LGZD), contre 62 % prévus actuellement. En chiffres absolus, ceci impliquerait un passage de 6’000 logements LUP à environ 3’200, soit une diminution de près de 50 %[1]. Le RPSL ne peut que s’opposer à une telle attaque portée au logement social.


1 - Le PAV comme élément cadre de la politique cantonale en matière de logement social


La réaffirmation du statut spécial du PAV dans le cadre de la signature de l’accord sur le logement à l’été 2020 témoigne de l’importance stratégique du projet pour la politique cantonale en matière de logement et d’aménagement du territoire. De plus la dernière mouture du projet, acceptée par plus de 60 % de la population à l’été 2018, devrait permettre la création de 12’400 nouveaux logements. Sur les terrains propriétés des collectivités publiques et situées en zone de développement, 62 % seront des LUP. Sur l’ensemble du PAV, c’est à dire en faisant abstraction du propriétaire de la parcelle (public ou privé), environ 50 % des logements seront des LUP.



En outre sur les parcelles publiques, des PPE en droit de superficie seront construites à hauteur de 12 % du total des nouveaux logements prévus dans le cadre de l’ensemble du PAV[2]. En votant oui à la modification de la loi 10788 relative au PAV, la population cantonale a donné un signal fort au projet PAV, et plus généralement à la construction de logements sociaux. En remettant en question le statut spécial du PAV et la mouture actuelle du projet, les dépositaires du projet de loi s’en prennent d’une part, au résultat d’une votation populaire récente et d’autre part, à l’accord sur le logement signé il y a à peine un an. Ceci est d’autant plus surprenant que nombre de ces dépositaires ont, par l’intermédiaire de leur parti, participé aux négociations ayant abouti à la signature de cet accord.



Au regard de ce qui précède le RPSL considère qu’en remettant en question le statut spécial du PAV et la mouture actuelle du projet, la droite s’attaque frontalement au logement social. Cette attaque est d’autant plus problématique qu’elle intervient dans un contexte cantonal de pénurie de logements bon marché et que les conséquences économiques de la crise sanitaire ont déjà commencé à se faire sentir, et qu’elles s’annoncent désastreuses pour les couches de la population les plus demandeuses en terme de logement social. Pour rappel au 31 décembre 2019, 7’451 personnes étaient inscrites auprès des fondations immobilières de droit public et se trouvaient donc en attente d’une solution de logements bon marché. Ce chiffre important atteste de la forte demande existante en ce qui concerne les solutions de logements bon marché dont font partie les LUP.



2 - La mixité sociale comme leurre

De l’aveu de ses dépositaires, la motivation principale justifiant l’abrogation du statut spécial du PAV est de parvenir à davantage de mixité sociale[3]. Pour ce faire, ils n’hésitent pas à citer Monsieur le Conseiller d’État Antonio Hodgers lequel aurait déclaré au moment de la signature de l’accord sur le logement à l’été 2020, que la mixité sociale était la clé d’une société apaisée[4]. Le RPSL considère que le PAV est un exemple de mixité sociale réussie, en atteste la répartition des logements au sein du périmètre total du PAV.



Dans cette optique, il convient de rappeler que nombreuses sont les communes n’abritant pas de parc locatif LUP et que l’effort n’est pas réparti équitablement sur l’ensemble du territoire genevois. Par exemple un périmètre comme celui de la Tulette à Cologny, situé en zone de développement, compte 70 % de PPE. Si la mixité sociale importait tant aux dépositaires du projet de loi, il y a longtemps qu’ils auraient entrepris quelque chose pour parvenir à davantage de mixité sociale sur l’ensemble du territoire cantonal, et pas uniquement au PAV. Au lieu de ça, les dépositaires préfèrent stigmatiser le logement social en assimilant les périmètres fortement dotés en LUP à des ghettos, et en déplorant le manque de logements à destination de la classe moyenne. Selon eux, la classe moyenne serait la grande exclue du PAV au motif que les logements prévus au PAV ne correspondraient pas à ses besoins.



Se situant à rebours de cette perspective, le RPSL considère que le PAV est un exemple de mixité sociale réussie. En effet en réalité le LUP comprend une grande diversité de catégories de logement, allant du logement HBM au logement HM. De surcroit, le PAV prévoit des PPE en droit de superficie. Cette catégorie permet de développer des logements de milieu de gamme et accessibles, grâce aux spécificités du droit de superficie[5]. En ce sens la PPE en droit de superficie « offre […] une diversification de l’offre de logements dans le périmètre PAV »[6] et permet de par ses spécificités d’éviter les « mécanismes de spéculation »[7].


Le tableau 1 dresse un aperçu de la répartition des types de logements sur le périmètre du PAV, le tout en chiffres absolus. Le tableau 2 permet une comparaison de la répartition des types de logements prévue par l’accord sur le logement signé en 2020 et ayant abouti à une modification de la LGZD (Colonne « Simulation 1 » et Colonne « Simulation 2 »), et de celle adoptée en 2018 suite à la votation populaire ayant abouti à la modification de la loi PAV (« Simulation 3 »). La « Simulation 2 » diffère de la « Simulation 1 » dans la mesure où l’Art. 4A al.1 et l’Art. 4A al.2 y sont pris en compte (ce qui n’est donc pas le cas de la « Simulation 1 »).





On observe les éléments suivants. Pour la catégorie « HBM LUP », la différence entre la « Simulation 3 » et la « Simulation 2 » est de +1.89 %. Pour la catégorie « HLM-HM-LUP », la différence est de +13.18 %. Pour la catégorie « Locatif libre » la différence est de -1.55 %. Pour la catégorie « À choix », la différence est de -13.34 %. Pour les PPE (catégorie « PPE en DDP » et « PPE » analysées conjointement), la différence est de 0.16 %.



Tableau 2



Au regard de ce qui précède, on se rend compte que la classe moyenne ne sortirait nullement gagnante suite à l’abrogation du statut spécial du PAV telle que défendue par les dépositaires. En effet, les 13,18 % de logements « HLM-HM-LUP » en plus prévus par la « Simulation 3 » par rapport à la « Simulation 2 » sont absorbés par la catégorie « À choix ». De plus, si la part totale de PPE ne diffère presque en fonction des simulations, il importe de préciser que la PPE en DDP serait interdite du périmètre du PAV si l’on s’en tient au texte de la motion M 2748.



Le RPSL considère qu’une diminution de la catégorie « HLM-HM-LUP » se fait nécessairement aux détriments des intérêts de la classe moyenne. De surcroit, autoriser uniquement la construction de PPE en DDP se fait également à l’encontre des intérêts de la classe moyenne puisque la PPE en DDP bénéficie d’un certain contrôle des prix par l’État, ce qui n’est nullement le cas de la PPE en pleine propriété qui permet des logiques spéculatives entre autres. Dans cette optique, le RPSL considère que le prétendu souci de mixité sociale affiché par les dépositaires du projet de loi n’en est pas un et cache en réalité la volonté de pouvoir laisser libre-cours à des pratiques spéculatives au PAV. Dans un contexte de pénurie de logements, le RPSL ne peut que dénoncer une telle attaque portée au logement social.



3 - Laisser libre cours aux logiques spéculatives

À la vente, le prix d’une PPE en droit de superficie est de 10 % inférieur à celui d’une PPE contrôlée en pleine propriété, et de 25 à 50 % inférieur à ceux du marché libre dans le centre-ville[8]. Le mécanisme du droit de superficie, tel que prévu dans la loi 10’788, proscrit en outre toute logique spéculative. La proscription de toute logique spéculative permet d’assurer un contrôle des prix, et ainsi de s’assurer que ce type de bien ne soit pas uniquement accessible à la classe moyenne aisée.


Alors même que la classe moyenne serait la grande exclue du PAV, prétendue exclusion justifiant en grande partie le dépôt du PL 12934 dont il est question dans cette prise de position ; la M 2748, adjointe au PL 12934, vise explicitement à ce que les PPE construites dans le périmètre du PAV ne le soient qu’en pleine propriété[9]. Le RPSL considère que la classe moyenne dans son ensemble n’a pas à être prise en otage par les dépositaires du PL 12934.



En réalité ces derniers sont dérangés par le fait que la PPE en droit de superficie et les logements LUP sont soustraits sur la durée aux logiques spéculatives en permettant un contrôle de l’État durant plusieurs décennies. Cette régulation par l’État, et donc la soustraction d’une majorité de terrains du PAV aux logiques spéculatives, empêche probablement davantage de dormir les dépositaires de ce projet de loi que la pénurie de logements, à laquelle est confrontée population genevoise. Les dépositaires ont donc beau jeu de se prémunir d’un apparent souci pour des quartiers mixtes socialement. En réalité, cet apparent souci masque une profonde aversion au logement social et un intérêt marqué pour les logiques spéculatives, si chères à la droite immobilière.



Conclusion

En cherchant à tout prix à abroger le statut spécial dont jouit le PAV dans la LGZD, les auteurs du PL 12934 et de la M 2748 priveraient le canton de Genève d’un instrument essentiel de la planification cantonale du logement social. En effet, il en résulterait un ralentissement de la construction de logements sociaux, alors même que la pénurie en la matière est bien réelle. En ce sens il s’agit d’une attaque claire portée à la politique cantonale en matière de logement social. De plus pour les années à venir et au regard de la volonté cantonale de ne plus déclasser en zone agricole, les terrains sur lesquels construire du logement social seront d’autant plus rares, rendant la réalisation du PAV sous ses modalités actuelles d’autant plus indispensable afin de lutter contre la pénurie de logements.[10]



En outre en prétendant que ses besoins ne sont pas couverts par la mouture actuelle du PAV, les dépositaires du projet de loi prennent en otage la classe moyenne alors même qu’une grande diversité de logements est prévue à cet effet au PAV (notamment HM et PPE en droit de superficie). En réalité, la classe moyenne se trouve instrumentalisée par la droite qui cherche en réalité à laisser libre champ aux logiques spéculatives, alors même que ces logiques sont responsables de la situation de pénurie actuelle. Considérant que le résultat de la votation populaire de 2018 traduisait une réelle préoccupation de la population pour des solutions de logement bon marché, le RPSL s’oppose au PL 12934 ainsi qu’à la M 2748, et recourra à tous les moyens en sa possession pour y parvenir.


[1] Pour autant que le nombre de nouveaux logements construits au PAV ne change pas si le PL 12934 et la M 2748 étaient un jour appliqués. Projection effectuée sur la base de chiffres


disponibles ici : https://ge.ch/grandconseil/data/texte/PL12052.pdf, p. 26. [2] https://ge.ch/grandconseil/data/texte/PL12052.pdf, pp. 21-27 [3] https://ge.ch/grandconseil/data/texte/PL12934.pdf, p.2 [4] idem [5] cf. Art. 4 al. 9 L 10788 (relative à l’aménagement du quartier « Praille-Acacias-vernets ») et https://ge.ch/grandconseil/data/texte/PL12052.pdf, pp. 17-18, 23-27 [6] https://ge.ch/grandconseil/data/texte/PL12052.pdf, p. 17 [7] https://ge.ch/grandconseil/data/texte/PL12052.pdf, p. 18 [8] https://ge.ch/grandconseil/data/texte/PL12052.pdf, pp. 21-27 [9] Celle-ci demande au Conseil d’État de « spécifier au sein de ce même avant-projet modifiant la loi 10788 que les logements à réaliser en propriété par étages le sont en pleine propriété » (https://ge.ch/grandconseil/data/texte/M02748.pdf, p. 3) [10] « Toutefois en matière d’aménagement du territoire, l’exécutif veut privilégier " la ville dense, des courtes distances et des espaces verts, où l’essentiel des besoins quotidiens sont satisfaits à proximité ", a décrit Antonio Hodgers, précisant que " le Conse



il d’état a décidé qu’il n’y aura plus de grands déclassements des terres agricoles. " » (https://www.rts.ch/info/regions/geneve/12247659-le-canton-de-geneve-prend-41-mesures-pour-la-neutralite-carbone-en-2050.html?rts_source=rss_t)


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